Il aura fallu attendre deux bonnes heures sous le crachin parisien avant que ‘Steam’ ne commence… Presque impatient, la frange mouillée et les chaussettes humides, on ne saurait pourtant en vouloir au Cirque électrique. Puisque de ce côté de la Porte des Lilas, il serait injuste de le cacher, on sait recevoir. Odeur de crêpe et buvette généreuse, librairie engagée, concerts et exposition d’œuvres de Clovis Trouille aux murs (dans le cadre du festival Hey ! Oh Let's Go)… La Dalle aux chapiteaux fait beaucoup plus que proposer des spectacles de cirque. Elle invite à passer une soirée entière entre ses toiles de cire, à y discuter art contemporain et à refaire le monde… Reste que, lorsque les ouvreurs invitent enfin le public à rejoindre les bancs du chapiteau, un bruyant soupir de soulagement s’échappe côté enfants.
Et là, c’est comme si le Cirque électrique avait imaginé son spectacle pour coller à la météo. « Il pleut sur Barcelone… Il pleut sur Liverpool… Il pleut sur Syracuse » récite l’homme-orchestre derrière son micro. Parfaite euphonie avec le dehors, les premiers mots de ‘Steam’ sont ceux d’Alain Bosquet dans ‘Sonnets pour une fin de siècle’. De la poésie noire pour une ambiance chape de plomb garantie. « L’Europe est en crise… l’Europe s’exile… » poursuit-il avant de laisser place à la musique et aux acrobates. Trois circassiens qui rivalisent d’audace et de souplesse mais qui, faute de mise en scène tangible, ne font guère plus qu’enchaîner les numéros. Et pourtant, tout est là. Les sauts sont vertigineux, les arabesques sensuelles, les regards intenses. En plus de la performance pure, dans cette scénographie de néon et de fer, chacun des acteurs pimente son passage sur scène d’une touche personnelle. Ainsi, et comme pour s’acheter un supplément d’âme, le jeune Nelson prétend s’ennuyer pendant que la trapéziste Tarzana Fourès s’enroule fiévreusement à sa corde. On note quelques maladresses, mais le ton est donné, l’ambiance fin de siècle réussie. A la force du poignet, avec précision et maîtrise, ce jeune cirque recueille sifflets d’encouragement et salves d’applaudissements. Seuls quelques enfants effrayés par la scie musicale quitteront le navire, les autres apprécieront, sans aucun doute, le voyage.
La version 2013 invite sur scène deux artistes supplémentaires : en contorsion et mât chinois, Séverine Bellini et en hula hoop et portée acrobatique, Robin Auneau.
>> A partir de 8 ans.