Après avoir adapté Strindberg et Tchekhov, l’artiste brésilienne Christiane Jatahy s’attaque à Shakespeare pour une adaptation de l’impitoyable ‘Macbeth’. Sauf qu’a priori, lorsque le spectateur pénètre l’espace du spectacle (une salle noire où pendent quatre écrans géants et où trône un bar), rien n’indique que Shakespeare se cache dans un coin. Point de sorcières et d’épées ensanglantées mais quatre tableaux vivants. Diffusées sur de larges écrans qui bougent et se meuvent, des vidéos racontent Prosper, Michelle, Ismaël et Igor. Des courts films qui décrivent le désespoir, l’humiliation et la violence et que l’on regarde assis ou debout, dans une circulation libre. Soudain, dans ce groupe éclectique on observe des spectateurs interagir avec des accessoires déposés près du bar. Ils plongent leurs mains dans le sang, plongent des dents de poisson dans un aquarium, tendent des billets de banque… Des actions filmées à notre insu et qui feront plus tard le cœur du spectacle. Comme souvent chez Christiane Jatahy, le spectacle n’est pas où on l’attend.
Et ‘A floresta que anda’ (la forêt qui marche, celle de Macbeth) n’a que très peu d’ADN commun avec les spectacles qui utilisent aujourd’hui la vidéo. On se sent dans cette pièce du Centquatre comme dans un laboratoire où l’on ne sait où poser les yeux. Où se déroule l’action ? Que faut-il faire ? Doit-on rester debout ou assis ? Faut-il s’approcher du bar ou se coller aux écrans ? Sans mode opératoire, sans consignes claires, le public erre un peu perdu dans l’espace scénographié. Très vite, les repères sont brouillés. Certains s’ennuieront en attendant « le spectacle », d’autres tenteront de percer le mystère, de trouver la clef de cette salle noire. Puis, alors que l’on a commencé à s’habituer au parcours libre, les écrans se collent les uns aux autres et un tout nouveau chapitre s’amorce, cette fois-ci mené (en partie) par la comédienne Julia Bernat. Une partie tout aussi déstabilisante, mais qui explique en partie la première.
‘A floresta que anda’ ne ressemble à rien et s’inspire de tout, du documentaire, du théâtre, de la performance, du cinéma. Et ce n’est pas parce que l’on se perd souvent dans cette forêt que le voyage ne vaut pas le détour.