Odysées

Le festival Odyssées accoste dans les Yvelines

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Du 18 janvier au 2 avril, la biennale Odyssées en Yvelines propose six créations de théâtre jeune public. Un projet territorial de haute tenue.

Quatre comédiens, deux musiciens, un scénographe, une assistante à la mise en scène, une créatrice de marionnettes... Portée par une équipe de douze personnes, l'adaptation de ‘Peer Gynt’ d'Ibsen par Sylvain Maurice, directeur du théâtre de Sartrouville et des Yvelines, illustre à elle seule l'ambition du festival Odyssées en Yvelines.

« Créée en 1997, cette biennale organisée et produite par le théâtre et soutenue par le conseil départemental a vocation à proposer aux jeunes publics des créations ambitieuses, sur des thèmes variés et avec des esthétiques singulières. Cela aussi bien dans des formes légères susceptibles d'être jouées dans des classes, que dans des productions de plus grande envergure », présente le directeur et metteur en scène. Les six spectacles au programme de cette dixième édition promettent en effet la découverte d'univers singuliers, où formes et esthétiques sont pensées avec la même exigence. 

Le jeune public au pluriel

 Si le « théâtre enfance et jeunesse » – qualificatif que Sylvain Maurice préfère à celui, plus courant, de « théâtre jeune public » –  a longtemps été considéré comme un secteur de création mineur, Odyssées en Yvelines prouve que cette période est bel et bien révolue. Avec une pièce de théâtre d'ombres (‘Le Cantique des oiseaux’, d'après le texte éponyme du poète persan du XIIe siècle Farid Al-Din Attar), une pièce musicale (‘Camille, Max et le Big Bang Club’) mise en scène par Nicolas Laurent, un spectacle de marionnettes (‘Elle pas princesse lui pas héros’ de Johanny Bert), deux formes à la croisée des disciplines (le ‘Peer Gynt’ de Sylvain Maurice et ‘Master’ de David Lescot, monté par Jean-Pierre Baro) et les philosophiques ‘Trois songes’ conçus par Olivier Coulon-Jablonka et l'auteur Olivier Saccomano, le festival montre l'étendue des possibles dans le secteur concerné.

La programmation de ces Odyssées interroge d'ailleurs la nature et les limites de ce secteur. Parmi les artistes choisis cette année par Sylvain Maurice, aucun n'est en effet spécialisé dans la création pour l'enfance et la jeunesse. Même Aurélie Morin, qui avec sa compagnie Le Théâtre de Nuit travaille depuis une dizaine d'années avec le jeune public, dit plutôt faire du théâtre « tout public ». « Mon univers étant avant tout visuel, je ne crois pas qu'il s'adresse à un public plutôt qu'à un autre. Chacun, selon son âge et son imaginaire, doit pouvoir y trouver matière à rêve et à réflexion », explique-t-elle. Sylvain Maurice pense différemment. Pour lui, « chaque tranche d'âge appelle une adresse particulière ». Il s'est cette année particulièrement penché sur le théâtre adolescent, « la plus récente des branches du théâtre enfance et jeunesse, où se développent des propositions passionnantes ». Dans Odyssées, ‘Trois songes’ et ‘Master’ représentent cette tendance. 

Le goût du risque et de l'invention

Avant que Sylvain Maurice ne leur commande une pièce pour la dixième édition de ce festival qu'il tient à « remettre au centre du projet du CDN de Sartrouville, dont il fait l'originalité », Olivier Coulon-Jablonka et Jean-Pierre Baro ne s'étaient jamais aventurés du côté de l'adolescence. Mais ils font tous deux partie de l'Ensemble Artistique créé par Sylvain Maurice en 2013, avec Johanny Bert et la marionnettiste Bérangère Vantusso, programmée dans la précédente édition des Odyssées. Le directeur du théâtre entend ainsi à la fois renforcer la cohérence de sa structure et multiplier dans son festival les approches de la création jeune public. Une audace d'autant plus précieuse qu'elle est rare dans ce domaine de la création, « où producteurs et diffuseurs ont tendance à prendre moins de risques encore que pour le reste de leur programmation ».

Sylvain Maurice insiste aussi sur la dimension territoriale des Odyssées en Yvelines. Chaque spectacle étant créé dans une ville différente, à l'issue d'une résidence d'au moins deux semaines dans des établissements scolaires, les artistes partagent un temps de création avec les élèves qui verront ensuite leur spectacle. « Ce travail hors-les-murs est très précieux pour moi », affirme aussi Jean-Pierre Baro. Pour ce comédien et metteur en scène, qui « sans l'éducation nationale n'aurait jamais rencontré le théâtre », Odyssées en Yvelines est l'occasion de traiter au collège d'un sujet quasi absent des programmes scolaires : la décolonisation. « A un moment où l'on parle de valeurs françaises à tout va et où la création a son rôle à jouer dans le débat démocratique, des projets comme Odyssées nous permettent de réinventer nos pratiques, de leur redonner du sens. » Centré sur le rap, Master a d'ailleurs éveillé chez Jean-Pierre Baro des envies d'opéra.

Ce n'est pas pour rien que des artistes majeurs de la scène française comme Joël Pommerat, Fabrice Melquiot, Laurent Guttmann ou encore Phia Ménard créent pour les jeunes publics. « Ces derniers ont beaucoup moins de préjugés sur le théâtre que les adultes, ce qui nous permet d'expérimenter autrement, peut-être plus librement », dit Sylvain Maurice. Même si le fait de devoir jouer dans une salle de classe impose certaines contraintes. Avec sa pièce consacrée au procès de Socrate, Olivier Coulon-Jablonka a par exemple mis entre parenthèses le théâtre documentaire qu'il développe avec sa compagnie Moukden Théâtre pour explorer au mieux le potentiel de cet espace. Ses ‘Trois songes’ sont pour cela très prometteurs. Tout comme les cinq autres spectacles à découvrir durant le festival. 

Festival Odysées
10e édition de la biennale dédiée à la création théâtrale pour l’enfance et la jeunesse dans tout le département des Yvelines.
Du 18 janvier au 2 avril 2016. 

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