La leçon à retenir en sortant du ‘Porteur d’histoire’ ? Une affiche ratée peut cacher une très belle pièce. Car s’il ne fallait se fier qu’au blanc faussement vieilli de son fond, à sa police bleue démodée ou encore à son visuel franchement raté d’une main tenant une pile de bouquins, il est certain qu’elle se verrait condamnée à l’oubli.
C’est donc avec appréhension que l’on s’installe dans la petite salle du Studio des Champs-Elysées, face à cinq comédiens déjà présents sur scène. A part eux, assis sur des chaises, seul un tableau noir trône dans le fond, avec à sa gauche une tringle remplie de vêtements divers. Habillés tous à l’identique, en blanc et noir, ils attendent que leur public prenne place. Une façon de mieux retenir son souffle, semblerait-il, avant de commencer à jouer pour deux heures qui défilent à toute vitesse.
Mais avant de rentrer dans le vif du sujet, un préambule. Une mini-réflexion sur l’Histoire et l’histoire, afin de rappeler que tout n’est jamais que fiction, dès lors qu’il s’agit de mots. Montrer que, dans la parole, réside finalement le meilleur moyen de manipulation, à condition de la maîtriser parfaitement.
A partir de là tout se bouscule, les histoires, les personnages, les costumes, les époques, nos pensées. Le point de départ se trouve en Algérie au début des années 2000, mais très vite apparaissent les routes pluvieuses des Ardennes, le Paris d’Alexandre Dumas, le port de Marseille. Un personnage raconte un récit, dans lequel un des personnages en narre un autre, et ainsi de suite, de très nombreuses fois. Et ce, sans jamais nous perdre un seul instant.
Tout, dans cette pièce, s’apparenterait en fait à un film. Aussi bien le suspense, savamment entretenu, que le nombre impressionnant de personnages et de sauts dans le temps qui la composent. La fin arrive bien trop vite, et l’on en ressort avec le tournis, des images et des mots plein la tête, avec une seule envie : celle de la revoir, pour se laisser prendre, encore une fois, par ces comédiens de grand talent.
Critique par : Pia Bou Acar