Sans doute Martin Scorsese représente-t-il, au cœur du cinéma américain, ce qu'un Neil Young aura été pour la musique folk : la quintessence d’un renouveau, d’une réappropriation d’un médium codifié pour accompagner l’émergence, au tournant des années 1960-70, d’une contre-culture post-hippie plus âpre que celle qui la précédait. De l’élan du « Flower Power » restent alors surtout les massacres de Charles Manson, l’embourbement américain au Vietnam ou des cinglés hystériques tout droit sortis d’une planche de Robert Crumb en plein bad trip.
Débutant au cinéma dans la seconde moitié des années 1960, le jeune Martin Scorsese apparaît alors assez influencé par le cinéma expérimental de l’époque (voir son court métrage, drôle et sanguinolent, ‘The Big Shave’). Mais c’est davantage encore le néoréalisme italien et la Nouvelle Vague qui vont inspirer, dès son premier long métrage (‘Who that knocking at my door’, en 1967) son dynamisme brutal et sa manière de tourner in situ, à même les rues du quartier de Little Italy ; où, fils d’immigrés italiens, il est né en 1942.
Dès 1973 et son deuxième long métrage, ‘Mean Streets’, avec Harvey Keitel et Robert De Niro, Scorsese semble avoir déjà trouvé sa formule et ses thèmes, ses lieux et ses acteurs de prédilection. New York, le Bronx et Little Italy. La religion, passion, chute et rédemption incluses. L’argent. Et des délinquants, dealers ou toxicos, mafieux, oiseaux de nuit dérivant comme dérivent alors les années 1970. Avec De Niro comme acteur-fétiche, Martin Scorsese enchaîne les succès, à la fois critiques et commerciaux : ‘Taxi Driver’, ‘Raging Bull’, ‘La Valse des pantins’, jusqu’aux ‘Affranchis’ en 1990. Puis ‘Les Nerfs à vif’ en 1991, ‘Casino’ en 1995.
Et à partir des années 2000, c’est avec Leonardo DiCaprio que Scorsese se renouvelle, avec des biographies de figures de la puissance financière, qu’il s’agisse de Howard Hugues (‘Aviator’) ou du trader Jonathan Belfort (‘Le Loup de Wall Street’), et des films de genre auxquels le réalisateur impose sa patte de vieux briscard parfois roublard (‘Les Infiltrés’, ‘Shutter Island’). Surtout, à 72 ans, Martin Scorsese semble n’avoir rien perdu de son énergie. C’est donc avec enthousiasme et curiosité qu’on attend l’exposition et la rétrospective que lui consacrera la Cinémathèque à la rentrée. En sa présence, qui plus est.
>>> Exposition Martin Scorsese
>>> A la Cinémathèque française, du 14 octobre 2015 au 14 février 2016