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Quiproquos, valets manipulateurs, amours secrètes, révélations finales… On a beau connaître sur le bout des doigts les ficelles du théâtre de Marivaux, rien n’y fait. L’écriture de ce génie du XVIIIe siècle réussit systématiquement à insinuer le doute dans nos esprits. Pourtant, on le sait que cette comédie se finira forcément bien. On les a déjà vus, ces deux-là, Dorante et Araminte, qui n’osent pas s’avouer leur amour mais qui, au bout du compte, se jetteront dans les bras l’un de l’autre. Quand bien même, jusqu’au dénouement on hésitera, on tremblera et on soupirera avec eux. « Eux » sont interprétés par Isabelle Huppert, Louis Garrel et Bulle Ogier. Rien que ça. Un casting bankable qui assure à l’Odéon un taux de spectateurs record sur ses fauteuils carmin. C’est qu’il faut un certain panache, une bonne dose d’intelligence textuelle et une sacrée expérience du plateau pour éviter que ces « fausses confidences » ne se résument à une énième lecture assommante et insipide. Luc Bondy en sait quelque chose, lui qui a déjà par trois fois mis le nez dans les affaires de Marivaux, et investit la scène à son service. Pour cette nouvelle mise en scène, le directeur de l’Odéon a invité sur son plateau une pléiade de comédiens aguerris. A commencer par Jean-Damien Barbin, qui campe un Arlequin au teint cendré et à l’interprétation nourrie de détails. Et bien sûr Isabelle Huppert irradie en Araminte mutine dans son pyjama ivoire siglé Dior, sans voler la vedette aux autres personnages
Un boxeur en short rouge coiffé d’une crête iroquoise. Un duo d’acrobates les yeux bandés. Des escarpins carmin qui se déplacent à l’aveugle… Mis en scène par Christophe Huysman, ‘Tétrakaï’ – spectacle de fin d’études du Centre national des arts du cirque – n’est jamais vraiment là où on l’attend. Sur un plateau circulaire repeint hâtivement en blanc, les treize artistes de la promotion vont confronter leur technique acrobatique à leur imaginaire, créant des liens entre les agrès et l’histoire (les histoires ?) qu’ils vont raconter. Le portique coréen se transforme alors en symbole de la fragilité des relations amoureuses – offrant au passage de magnifiques scènes de voltige. Le trapèze Washington devient le théâtre d’une bataille sans merci et au ralenti, le mât chinois un échappatoire vertical. Sans jamais quitter du regard l’aspect narratif de leur prestation physique, les interprètes se frottent malgré tout à l’agrès. Ils en délimitent les contours, profitent de leur éventuelle mobilité, ne forment plus qu’un.Et lorsqu’ils sont perchés à plusieurs mètres du sol, un fin câble les protégeant du drame, les artistes brillent de mystère et d’intensité. Pendus à leur trapèze, au sommet de leur mât ou les pieds dans le vide, ils reposent à la frontière avec le visible et l’invisible, tantôt humains, tantôt volatiles. Des scènes d’une grande beauté parasitées par un texte composite et invasif. L’on passe ainsi de « L’argent la fait vomir, il pèse trop lourd » à « Qui suis-je ? Je
Ça se bouscule aux portes du théâtre Mogador. La foule frétille d’impatience pour le lancement du spectacle musical venu de Broadway, 'La Belle et la Bête', version française. Une petite fille en robe de princesse, portée juste pour l’occasion, des parents excités, deux copines ou encore un couple de trentenaires apprêtés. Tous sont venus rechercher la féérie, ou retrouver leur âme d’enfant. On aura beau dire, c’est un peu ça, la magie Disney. La voix de Catherine Deneuve amorce le « Il était une fois » dans une belle sobriété, et nous raconte comment le Prince a été transformé en Bête. C’est alors que l’orchestre en avant-scène donne le ton du premier tableau, qui s’ouvre sur le village de Belle, transformant l’alcôve à l’italienne en véritable décor de situation, où les commerçants se croisent et chantent tout en vacant à leurs occupations. Les vagues souvenirs du dessin animé de 1991, rangés dans un petit coin de nos têtes, ressurgissent soudain comme par enchantement. L’héroïne, taxée d’intello par ses voisins, se fait courtiser par ce goujat de Gaston, et entretient une relation fusionnelle avec son illuminé de père, qui l’emmènera aux portes du château de la Bête. Tout y est. Le spectacle colle parfaitement avec Disney (l’affiche avait donné le ton) mais sans tomber dans la mièvrerie. Tous les ingrédients d’un bon divertissement sont réunis : des décors féériques, qui nous portent de tableau en tableau jusqu’à l’escalier central duquel descendra la Belle le soir du fame
Suivez l’odeur du chocolat fondu jusqu’au théâtre Paris-Villette pour venir découvrir une cuisine pas comme les autres. Après avoir couché son enfant, papa retourne aux fourneaux de sa chocolaterie. Mais il a beau lutter, ses paupières se ferment malgré lui et le sommeil le surprend. Profitant de l’occasion, les casseroles et les moules s’animent en un joyeux chaos nocturne. La Clinquaille enfile son plus beau tablier pour donner du joli théâtre d’objets et de marionnettes qui plaira aux bambins les plus gourmands.
Le théâtre de Pippo Delbono ne laisse pas indifférent. Il émeut. Il déchire. Il détient une beauté à la fragilité dure, une puissance tourbillonnante. Chacun de ses spectacles devient alors pour ses spectateurs une sorte de rituel que l’on ne manquerait pour rien au monde. Parce qu’au fur et à mesure des années, Pippo, Bobo et les autres sont devenus comme une famille. Des parents que l’on ne voit pas assez et que l’on est toujours heureux de retrouver. Après l’émouvant ‘Doppo la battaglia’, après ‘Amore carne’, Pippo revient avec ‘Orchidées’, pièce en forme de voyage à travers l’âme humaine... Lors de notre rencontre en juin 2013, le metteur en scène italien nous confiait la difficulté avec laquelle il vivait depuis la mort de sa mère. ‘Orchidées’ évoque ainsi ce sentiment prégnant d’être perdu, « d’avoir perdu des choses précises, le sens du théâtre, de la représentation ». « L’orchidée, tu ne sais jamais si c’est vrai ou si c’est un mensonge » raconte l’homme de théâtre. Pour son spectacle, Pippo Delbono a fait appel au théâtre bien sûr, mais également à la danse, au cinéma et à la photo. Il a convoqué des pontes de l'écriture théâtrale (Shakespeare, Tchekhov) et a mélangé tout ça à son quotidien. « Un mélange explosif dans lequel tu retrouves le sens du théâtre et le sens de la vie. » Joli programme.
On a beau y être allé des dizaines de fois, la mythique salle Richelieu suscite toujours un sentiment particulier. En ce qui me concerne, ce n’est pas tant le velours des fauteuils ou la richesse des dorures qui font briller mes yeux mais le sentiment d’entrer dans un lieu historique. Un lieu où des générations d’acteurs et de techniciens font perdurer cet art un peu fragile. Depuis qu’un sacré coup de jeune a été donné à sa programmation et à ses choix artistiques, la Comédie-Française peut se targuer de proposer des saisons hétéroclites, de la petite lecture contemporaine intimiste au grand classique racinien. Un vrai bouillon de culture ! C’est en partant de cet état de fait que Véronique Vella a choisi de montrer ce que l’on pourrait appeler le « défi ‘Psyché’ ». D’un côté, elle part du théâtre, de sa propre cage de scène et des décors qui s’y entassent en attendant leur tour. Et de l’autre, elle prend à bras-le-corps cette pièce de plus de 4 heures, la triture un peu pour la rendre plus digeste. Elle décide de la jouer, comme on jouerait entre amis ou entre deux levers de rideau, avec les moyens du bord. Cet angle permet de suivre Psyché, avec facilité et évidence, du monde des vivants au monde céleste où elle retrouve L’Amour (Cupidon pour les intimes), puis aux enfers, et enfin chez Jupiter, au milieu des planètes. Même les intermèdes musicaux, qui tombent habituellement comme un cheveu sur la soupe, participent de cette fluidité entre des tableaux radicalement opposés
Dressé fièrement face au théâtre du Châtelet (et oui, ne vous trompez pas de trottoir !), le théâtre de la Ville est devenu en quelques décennies le temple incontesté de la création chorégraphique. Visionnaire hors-pair, son ancien directeur Gérard Violette y invita dès les années 1980 la crème de la danse contemporaine qu’elle soit allemande (Pina Bausch), flamande (Anne-Teresa de Keersmaeker) ou encore française (Maguy Marin). Si la danse à elle seule fait la réputation du lieu, sa programmation théâtrale ne démérite pourtant pas : Luc Bondy, le Berliner Ensemble ou encore la Nature Theater of Oklahoma y sont attendus en 2012. En 1996, une seconde salle de 400 places ouvre dans le 18e arrondissement, le théâtre des Abbesses y invite de jeunes chorégraphes et petites compagnies de théâtre afin de désengorger la place du Châtelet. Toutefois, il est bien possible qu’il vous faille vous armer de courage pour obtenir un siège hors abonnement (notamment pour le Tanztheater Wuppertal). Mais rassurez-vous, le jeu en vaut définitivement la chandelle.
En arrivant quelques minutes avant le lever du rideau, vous aurez tout le loisir d’admirer depuis le lobby la scintillante Tour Eiffel, voisine du théâtre de Chaillot. Ancien siège de l’ONU, c’est dans la grande salle qu’en 1948 fut signée la Déclaration universelle des droits de l’homme. Jean Vilar, Antoine Vitez et Jérôme Savary feront rejouer des comédiens sur son plateau, rendant les 1 670 places de Chaillot à ses premières amours : le théâtre populaire. Depuis peu presque exclusivement consacré à la danse contemporaine, Chaillot se dessine dorénavant comme le pendant moins international du théâtre de la Ville. Un large espace découpé en deux salles et qui rend hommage à toutes les écritures chorégraphiques, qu’elles soient influencées par le flamenco ou enracinées dans la culture urbaine. Egalement lieu d’apprentissage, le théâtre organise des rencontres, des ateliers et même une formation continue en histoire des arts !
Vous cherchez le théâtre de Gennevilliers ? Suivez les flèches. Imaginés par Daniel Buren, ces panneaux rouges et blancs jalonnent le chemin du métro jusqu’aux portes du bâtiment. Après le règne du fondateur Bernard Sobel, c’est le metteur en scène Pascal Rambert qui tire aujourd’hui les ficelles de ce centre national entièrement dédié à la création contemporaine. Nouvelle identité visuelle, propositions interdisciplinaires et organisation de nombreux festivals : le T2G met le cap sur la rencontre artistique. Amoureux de Molière ou Racine, passez votre chemin, Pascal Rambert ne pioche pas ces auteurs dans le répertoire. En revanche, vous n’y trouverez pas que du théâtre mais également de l’opéra (Oscar Bianchi et Joël Pommerat), de l’art (Nan Goldin), du cinéma, de la littérature et même de la philosophie (Emmanuel Alloa) ! Sachez enfin que certaines répétitions sont ouvertes aux Gennevillois.
A quelques mètres de la plus célèbre avenue parisienne, le Rond-Point met un point d'honneur à ne diffuser que des auteurs vivants : François Bégaudeau, Tatiana Vialle ou encore Jean-Marie Piemme faisaient ainsi partie de la programmation de la saison 2010-2011. Métamorphosé au début des années 2000, le Rond-Point est devenu un lieu multitâches décoré par Patrick Dutertre. Un espace qui s’articule autour d’une abondante librairie, d’un salon de thé et d’un restaurant au cas où la faim se ferait sentir. Ces trois salles baptisées Topor, Tardieu et Renault-Barrault n’accueillent pas seulement du théâtre mais aussi du cirque (Eloize, Le Cirque invisible) et parfois même quelques humoristes satiriques (Guy Bedos, Christophe Alévêque).
Cap à l’Est ! Niché dans une étroite ruelle du 20e arrondissement, le théâtre national de la Colline étonne au premier abord par son imposante façade transparente de 12 mètres de haut. Un décor de béton et de verre qui accueille en son sein un joli échantillon de la dramaturgie, du XIXe siècle à nos jours. Des étoiles de l’écriture dramatique – Norén, Pirandello, Bernhard, Brecht – mise au goût du jour par des ténors de la mise en scène tels que Krystian Lupa, Bernard Sobel ou encore Stanislas Nordey. Aujourd’hui dirigée par le metteur en scène Stéphane Braunschweig, la Colline propose en parallèle de ses spectacles des ateliers, des stages et des week-ends gratuits de formation pour les jeunes passionnés de théâtre.
« Temple absolu du théâtre » selon les termes de son directeur Olivier Py, l’Odéon ne compte pas que son théâtre à l’italienne au centre de Paris mais également un entrepôt de décors de spectacles construit en 1895 par Charles Garnier pour l'Opéra de Paris. Les Ateliers Berthier à l’extrême nord de la capitale sont devenus en mai 2005 la nouvelle salle de l’Odéon, gagnant ainsi près de 400 places. Anciennement sous le joug de la Comédie-Française, l’Odéon s’est affranchi au début des années 1990 en devenant le théâtre de l’Europe. Des metteurs en scène des quatre coins de l’Europe sont invités à présenter leurs productions en langue originale sur-titrée. Parmi eux Deborah Warner, Peter Zadek, Giorgio Strehler, Robert Wilson, Frank Castorf ou encore Thomas Ostermeier.
Il faut d’abord parcourir la ligne 5 du métro puis marcher quelques minutes avant d’arriver à la Maison de la culture de Bobigny. Mais le temps passé dans les transports en commun sera loin d'être perdu, surtout si vous avez choisi d’assister à un spectacle du Standard Idéal. Ce festival inauguré en 2004 invite chaque hiver sur ses planches la fine fleur des metteurs en scène européens. L’occasion de faire le plein de spectacles hongrois, allemands, anglais ou encore italiens. Un écrin de verre dans lequel se tient également l’Atelier des 200. Le temps d’un week-end, 200 amateurs sont invités à découvrir en compagnie des metteurs en scène de la saison l’envers du décor, notamment le jeu d’acteur. Il ne reste plus qu’à vaincre sa timidité et se lancer !
Aux manettes de cette scène conventionnée pour la danse, il y a José Alfarroba. Homme de théâtre actif, qui ne se contente pas d’ouvrir les portes de son lieu aux chorégraphes mais invite jeunes compagnies de théâtre, plasticiens en herbe (huit expositions par saison) et musiciens de tous bords. Spectacles jeune public, projections de films et festivals tous azimuts : le théâtre de Vanves émerveille par la richesse de sa programmation. Découpé en deux salles – le théâtre et la panopée –, le lieu se mobilise tout particulièrement à promouvoir les écritures contemporaines, mais sans frontières : « cette saison seront présentées des tragédies, un mélodrame, une grande fresque historique, des pièces "sociales"... et quelques ovnis » explique son directeur. Un espace de qualité qui accueille en son sein depuis quinze ans l’excellent festival de théâtre et danse Artdanthé. Un must en matière de rendez-vous culturel.
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