Si Arctic est un bon film, c’est parce qu’il se la joue strict minimum. Une aventure lo-fi qui place ses intensités dans de petites choses. Manger devient toute une histoire, et la solitude l’ennemi numéro 1. Les raisons de la survie restent remarquables. L'homme tient bon en se rattachant à la culture (ces petites sépultures qu’il entretient), et sera littéralement sauvé par une image.
Cinéma
On se demande toujours quel sera le dernier film de Clint Eastwood. On pensait que sa carrière se finirait en apothéose avec Gran Torino (2009, il avait alors 79 ans) et on se mettait le doigt dans l’œil (jusqu’au fond). Le vétéran revient plus en forme que jamais, et pour la première fois devant / derrière la caméra depuis son interprétation tête de mule dans Gran Torino. Dans un film course-poursuite made in US. Une aventure Deliveroo extrême.
Un conte contemporain, sale, rugueux, dans lequel la Bête serait aussi la Belle.
Après avoir été guide en Terre du Milieu (Le Seigneur des Anneaux), Viggo se la joue garde du corps italo-américain. Et il faut croire qu’il est plus difficile de protéger un homme noir dans l’Amérique des 60’s que dans le Mordor. Ses armes ? Le Green Book, une version ségrégationniste du Guide du routard, référençant les lieux acceptant les black.
Nic et David Sheff sont tout l’un pour l’autre. Une relation père-fils spéciale qui n’empêchera pourtant pas le jeune homme de tomber dans la drogue dure. Une descente aux enfers dans un film qui s’attache à tracer les frontières de la famille, celles de ses aptitudes et de ses impuissances. 2019, l’année où les films sur l’addiction ne peuvent plus être juste cools. Bye Bye Requiem for a Dream.
Ayka, jeune kirghize sans papiers, abandonne son nouveau-né à la maternité. Sa vie est dure, aussi rude que l’hiver qui recouvre maintenant Moscou. Entre petits boulots, patron-escroc, dette mafieuse et rixe policière, elle doit trouver le moyen de faire face à des urgences médicales. Oui, tout ça. Russie 2018, le foot et le reste.
Minuscule 2 est une aventure petit format et une grande victoire, qui prouve la solidité de la production française en terme d’animation.
Alors que Shota et son « père » volent à l’étalage, ils croisent sur leur chemin Yuri, une enfant laissée seule chez elle et qui a faim. Ils la recueillent et découvrent alors qu’elle est maltraitée. Ils décident donc de ne pas la rendre à ses parents et d’en faire un membre la famille. Une nouvelle petite sœur.
Marvel élargie sa généalogie en y intégrant des petits nouveaux (des versions alternatives de l’homme-araignée).
Taillé pour Sundance, le premier film du rapper Boots Riley (leader de The Coup) se la joue comédie sociale. Une œuvre anticapitaliste qui parle des disfonctionnements d’une société américaine et de ses dérapages : une agence propose des contrats à vie (néo esclavage) et n’hésite pas à manipuler la race humaine pour plus de rentabilité. Et autant vous dire, BoJack Horseman, dans la vraie vie, ça fait peur.
Expositions
Le nom de Nadia Léger ne vous dit sans doute rien. Figure méconnue de l’art du XXe siècle, cette esthète a été éclipsée de l’histoire de l’art par son mari, un certain Fernand Léger… Heureusement, le musée Maillol est là pour réhabiliter l’artiste et intellectuelle prolifique qu’elle était. Peintre élève de Malevitch, éditrice de revue, commissaire d’expo et militante communiste, cette Parisienne d’adoption a fait cohabiter ses racines biélorusses et les influences de l’avant-garde française dans son travail et dans sa pensée.
La dernière fois qu’on a vu Chiharu Shiota sur le sol parisien, c’était à la galerie Templon en 2023, pour la poétique expo Memory Under the Skin. Depuis, celle qu’on surnomme “l’Araignée” préparait la plus grande monographie de sa vie : The Soul Trembles. Conçue pour le Mori Art Museum de Tokyo, l’exposition s’arrête aujourd’hui sous la coupole du Grand Palais pour retracer près de 25 ans de carrière de l’artiste japonaise.
Il fallait bien 1 200 mètres carrés pour accueillir les installations monumentales de Chiharu Shiota (on en compte quand même sept) ainsi que des travaux plus minutieux, photos ou vidéos de performance, tout ça rassemblé sur un parcours thématique. Y a pas à dire : le programme fait envie. Comme Jeanne Mas, la plasticienne tisse en rouge et noir un ensemble cohérent où œuvres introspectives et premiers essais dialoguent dans des espaces immersifs saisissants.
Au-delà de l’aspect esthétique, l’exposition, rondement menée, nous permet de faire la rencontre d’une pionnière qui a tout essayé, entre expérimentation et tradition nippone. De son premier dessin d’enfant à l’évocation de l’incendie de sa maison dans In Silence (2024) en passant par sa performance corporelle douloureuse pour Becoming Painting (1994) et la menace d’un cancer des ovaires dans Cell et Rebirth and Passing (2019), Chiharu Shiota parle d’elle, des “frémissements de son âme”, et réussit l’exploit de le faire avec pudeur et grandiloquence à la fois.
Seul bémol : l’exposition est victime de son succès, avec, dans un Grand Palais fraîchement rénové, une horde d'influenceurs du dimanche qui se massent pour prendre la pose devant les traumatismes manifestés par l’artiste. Mais on ne leur en veut pas : c’est tellement beau.
Tout ce dont une femme a besoin pour écrire, c’est “de l'argent et d’une chambre à soi”, disait Virginia Woolf. Qu’aurait-elle pensé de notre ère où l’intime ne se conçoit plus derrière une porte fermée, mais dans un téléphone ouvert sur le monde ? C’est la question que pose le musée des Arts déco en dressant un état des lieux de cette notion complexe qui a tant évolué avec les époques. À travers 12 thématiques, L’intime, de la chambre aux réseaux sociaux nous plonge au cœur d’un voyage historique délicieusement indiscret. Ponctué de petites pièces reconstituées – la chambre, la salle de bains ou les toilettes –, le parcours multiplie les objets inédits pour parler d’un concept on ne peut plus humain : ce besoin d’introspection, de soin de soi, qu’il soit physique ou mental.
Des toiles de Pierre Bonnard aux photos de Nan Goldin ou de Zanele Muholi, des artistes très divers s’affichent dans cette expo qui se découvre à travers le trou de la serrure. Si certaines, telle L’Intimité d’Edouard Vuillard (1896), tombent un peu à plat, d’autres, comme le fameux tableau de Fragonard Le Verrou (1777), témoignent de l'intérêt parfois obsessionnel des artistes pour le sujet. Autre coup de cœur ? Les grandes pièces de design rassemblées sous la nef centrale, du lit clos des frères Bouroullec au fauteuil carrément sexy de Gaetano Pesce, La Mamma. Un peu plus laborieuse (et franchement flippante), la dernière partie s’attaque au lourd dossier de l’intime à notre époque, des vlogs tournés dans une chambre d’ado aux systèmes de vidéosurveillance. Une section qui soulève bien des questions sans apporter d’éléments de réponse, faute de recul sans doute.
Rassembler peintures de maîtres, cuvettes de chiottes et screens du compte Insta de Léna Situations pour parler d’un sujet aussi nébuleux était périlleux. Mais comme à son habitude, le MAD relève le défi haut la main et réussit à traiter l’intime dans une expo XXL aussi légère que documentée. Chapeau.
Passionné de mode ? Le Palais Galliera nous a concocté un petit cours d'Histoire allant des tenues du XVIIIe style Chronique des Bridgerton aux fringues les plus edgy de Rick Owens. Les robes qui se présentent à nous étaient soigneusement rangées, cachées dans le noir, ne sortant que très rarement pour une petite expo temporaire par-ci par-là. Pour les quelque 350 pièces exposées, c'est donc LA sortie de l'année : « Imprimés du XIXe siècle », « Robes cocktails des années 1950 », « Minimalisme des créateurs belges et japonais à partir des années 1980 »… L'événement pose aussi, un peu malgré lui, la question de l'institutionnalisation du vêtement : la mode est-elle un art comme les autres ? A voir la garde-robe de la comtesse Greffulhe (véritable icône de mode, sorte de Bella Hadid du XIXe) et les silhouettes déstructurées de Martin Margiela, il ne fait pas de doute : la mode a bel et bien sa place au musée. Et si vous en doutez, vous avez jusqu'au 26 juin pour vous laisser convaincre.
Coup de pot - pour nous -, à l’occasion de sa fermeture temporaire, le prestigieux Frick Collection a autorisé le transfert d’une partie de ses collections. Bilan à l’arrivée : une dizaine d’eaux-fortes composées à Venise. Ailleurs, c’est à la Tamise ou au port de Valparaiso (Chili) que Whistler offre consistance. Lorgnant du côté des maîtres flamands du XVIIe siècle ainsi que de Velásquez, Fantin-Latour et surtout Courbet, dont il fût l’élève et l’ami, Mister Whistler est aussi l’auteur de portraits à l’austérité magnétique. Cinq sont exposés à Orsay, tous sont de vraies pépites. Aussi et surtout, il y a cette saisissante triade de portraits en pied. De grands formats à la palette réduite (très sombre, ou très crème) harmonieusement mis en scène...
Restaurants
Cette cabane de plage du 11e vous emmène découvrir la cuisine des rues de Kingston
À Saint-Ouen, un ancien Top Chef invente la fusion algéro-méditerranéenne.
Dans le 16e, un restaurant gastronomique contemporain qui sort du lot, où goûter des spiritueux d’exception
Dans le 8e, au sein de l’écrin luxueux d'un palace, Jérôme Banctel cisèle une cuisine unique, créative et émouvante.
A Pigalle, une petite crêperie inventive et intraitable sur les produits
Dans un 11e pourtant saturé, ce petit bar-restaurant sort du lot avec ses assiettes au top
À Belleville, cette cantine plus chinoise qu’un panda pongiste affiche des prix défiants toute concurrence
Dans le Quartier latin, ce plaisant comptoir à douceurs et caféine évoque le Hanoï des 80’s
Vers Colonel Fabien, une vaste adresse pour boire et manger sans risquer le surendettement
A Voltaire, le chef Esu Lee twiste la cuisine coréenne dans son restaurant à lui
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